Le film Les Diaboliques d’Henri-Georges Clouzot, sorti il y a 70 ans cette année, est un chef-d’œuvre du cinéma d’horreur psychologique qui a non seulement marqué son époque, mais a également inspiré des réalisateurs tels qu’Alfred Hitchcock, notamment pour son film Psycho (1960). Basé sur le roman She Who Was No More de Pierre Boileau et Thomas Narcejac, le film raconte l’histoire de deux femmes qui conspirent pour tuer un homme abusif, mais les événements prennent une tournure bien plus sinistre et surprenante.
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Le Film et son Influence
Dans une interview avec le magazine L’Écran Fantastique, Robert Bloch, l’auteur du roman Psycho, a qualifié Les Diaboliques de « film d’horreur préféré de tous les temps ». Ce jugement est particulièrement significatif compte tenu de l’impact durable de Psycho sur le genre du thriller psychologique. Clouzot, avec son atmosphère de suspense glaçant, a créé un film qui mêle habilement les techniques du film noir et de l’horreur, une innovation qui a eu un profond effet sur le cinéma de l’époque.
L’Histoire de Les Diaboliques
Le film suit l’histoire de deux femmes, Christina (interprétée par la femme de Clouzot, Véra) et Nicole (Simone Signoret), qui trament la mort de Michel, leur mari et amant respectivement, un homme cruel et abusif. Après l’avoir noyé et jeté dans la piscine de l’école où elles travaillent, elles sont horrifiées de découvrir que son corps a disparu. Dès lors, l’intrigue se tord dans des directions inattendues, explorant le thème de la culpabilité, du châtiment et des apparitions fantomatiques.
L’Atmosphère et le Suspense
Clouzot est reconnu pour sa capacité à créer une atmosphère de tension incessante. Susan Hayward, dans son ouvrage de 2005 sur le film, décrit la vision de Clouzot du thriller comme étant « sombre, implacable, étouffante et cruelle ». En manipulant subtilement les attentes des spectateurs, le film joue avec l’idée d’un suspense croissant, où chaque événement semble s’éloigner de la résolution. Cette atmosphère intense et son absence de réconfort moral sont devenues des marqueurs essentiels du genre de l’horreur psychologique.
Les Diaboliques et son Impact sur Hitchcock
L’influence de Les Diaboliques est particulièrement évidente dans Psycho, un film qui partage de nombreuses caractéristiques avec le chef-d’œuvre de Clouzot, dont l’un des moments les plus mémorables : une scène de terreur dans une salle de bains. Hitchcock, après avoir été incapable d’adapter le roman She Who Was No More avant Clouzot, a regardé Les Diaboliques pendant le tournage de Psycho et a même adapté certaines de ses techniques, telles que l’interdiction de révéler la fin du film, qui a également été un aspect clé de la promotion de Psycho.
La Perversion des Normes de l’Horreur
Ce qui distingue Les Diaboliques, c’est son absence de violence explicite. Bloch a souligné que ce manque de sang et de violence brute était l’une des raisons du succès du film. Au lieu de cela, Les Diaboliques déploie une terreur psychologique de manière plus subtile, ce qui a inspiré une vague de films d’horreur psychologiques à venir. Ce film ne se contente pas de suivre les conventions du genre ; il les redéfinit en proposant des personnages complexes, une inversion des attentes classiques et une fin choquante qui défie les notions traditionnelles de bien et de mal.
L’Influence Durable sur le Genre
L’impact de Les Diaboliques sur les films d’horreur ne s’est pas limité à Hitchcock. Son mélange de tension psychologique, de manipulation du suspense et d’un twist final imprévisible a influencé de nombreux cinéastes. Par exemple, les films comme Repulsion de Roman Polanski (1965) et The Haunting de Robert Wise (1963) ont tous deux été influencés par l’atmosphère oppressante et les thèmes de l’isolement et de la folie présents dans Les Diaboliques. De plus, le genre du giallo en Italie, incarné par des réalisateurs comme Mario Bava et Dario Argento, a intégré ces éléments pour créer un sous-genre de l’horreur psychologique où le style visuel et la tension jouent un rôle aussi important que la violence.
Le Leg de Les Diaboliques dans le Cinéma Moderne
Comme le note Stephen King, l’un des auteurs d’horreur les plus célèbres au monde, la scène de la baignoire dans Les Diaboliques est l’un des moments les plus effrayants qu’il ait jamais vus dans le cinéma. Ce type de terreur psychologique intense, centré sur des personnages déformés par la paranoïa et la culpabilité, a ouvert la voie à un nouveau type de film d’horreur, plus psychologique et moins dépendant de la violence explicite.
En rétrospective, Les Diaboliques a permis au genre de l’horreur de s’épanouir dans une direction plus subtile et complexe, inspirant non seulement Hitchcock et ses contemporains, mais aussi toute une génération de réalisateurs qui ont fait évoluer le cinéma d’horreur vers des territoires plus sombres et psychologiquement profonds.
Cet article a été publié à l’origine sur : bbc