La Polynésie française vient de franchir une étape majeure dans la préservation de l’environnement marin en dévoilant la plus grande aire marine protégée (AMP) au monde. Avec près de 5 millions de kilomètres carrés désormais sous protection, ce territoire du Pacifique Sud s’impose comme un leader mondial de la conservation océanique. Cette initiative, saluée par la communauté internationale, vise à protéger la biodiversité, soutenir les pratiques traditionnelles et renforcer la résilience face au changement climatique.
Un engagement sans précédent : chiffres clés et portée
Une aire marine de taille record
La nouvelle AMP couvre une superficie impressionnante de près de 5 millions de km², soit plus du double de la France métropolitaine. Sur cette étendue, 1,1 million de kilomètres carrés bénéficient d’une protection stricte ou intégrale, interdisant toute forme d’extraction, qu’il s’agisse de pêche ou d’exploitation minière. D’ici la Journée mondiale des océans 2026, la Polynésie s’engage à porter cette zone hautement protégée à 1,6 million de km².
Des zones spécifiques sous haute protection
Deux régions bénéficient d’une attention particulière :
- 220 000 km² autour des îles de la Société
- 680 000 km² près des îles Gambier
Au total, près de 23 % des eaux polynésiennes sont désormais classées en protection renforcée, répondant ainsi aux standards les plus stricts de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN).
Préserver la biodiversité et les traditions
Un patrimoine naturel exceptionnel
Les eaux polynésiennes, notamment autour des îles Marquises, abritent plus de 550 espèces de poissons, dont 26 espèces de requins et de raies. Cette région représente également une zone de frai majeure pour le thon obèse, une espèce menacée. La création de cette AMP vise à offrir un refuge à cette biodiversité unique et à restaurer les populations marines en déclin.
Intégration des savoirs traditionnels
La gestion de la nouvelle AMP s’appuie sur les pratiques ancestrales telles que le rāhui, une coutume polynésienne qui consiste à interdire temporairement la pêche pour permettre la régénération des ressources. Cette approche, plébiscitée par près de 80 % de la population locale selon une enquête de 2019, est désormais intégrée aux dispositifs de gouvernance de l’AMP.
Un modèle de gouvernance et de coopération
Des règles strictes pour la pêche
Dans les zones hautement protégées, seules la pêche côtière traditionnelle, l’écotourisme et la recherche scientifique sont autorisés. Autour des îles Australes, Marquises et Gambier, la pêche artisanale est limitée à un rayon de 28 km, tandis qu’elle s’étend jusqu’à 55,5 km autour des îles de la Société, exclusivement pour des embarcations de petite taille et des techniques traditionnelles.
Un engagement contre l’exploitation minière
La Polynésie française interdit toute activité d’extraction minière en eaux profondes et le chalutage de fond dans ses nouvelles aires protégées, rejoignant ainsi les appels internationaux à la prudence face aux risques écologiques et économiques de ces pratiques.
Réactions et déclarations officielles
Les autorités polynésiennes affichent leur fierté
Le président Moetai Brotherson a souligné :
« En Polynésie française, l’océan est bien plus qu’un territoire : c’est la source de vie, de culture et d’identité. En renforçant la protection de Tainui Atea, nous affirmons notre souveraineté écologique et créons des sanctuaires de biodiversité pour nos peuples et les générations futures. »
Il a également rappelé la gestion séculaire des ressources marines par les Polynésiens, désormais alignée sur les standards internationaux de l’UICN.
Soutien de la communauté internationale
Grethel Aguilar, directrice générale de l’UICN, a salué « une contribution d’envergure mondiale à la protection de notre océan unique ». Elle a ajouté que la Polynésie « fixe un nouveau standard de leadership en matière de conservation marine ».
Donatien Tanret, représentant de Pew Bertarelli Ocean Legacy, a insisté sur l’importance de la consultation des communautés locales et de l’intégration des savoirs ancestraux pour relever les défis contemporains.
Un exemple pour la planète
Un cap vers les objectifs mondiaux
Alors que seulement 8,3 % des océans du globe sont actuellement protégés, la décision polynésienne rapproche la communauté internationale de l’objectif de 30 % d’aires marines protégées d’ici 2030, fixé lors des conférences mondiales sur la biodiversité.
Un impact global depuis le Pacifique
La Polynésie française, en partenariat avec d’autres nations insulaires du Pacifique comme Palaos, affirme sa responsabilité dans la préservation de plus de 4 % de la zone économique exclusive mondiale. Les dirigeants rappellent que « l’océan est profondément lié à l’identité spirituelle et au patrimoine culturel de nos communautés. Il est le berceau de la vie, méritant respect et protection. »
Perspectives et enjeux futurs
Un modèle à suivre
En combinant protection stricte, implication des communautés et reconnaissance des savoirs traditionnels, la Polynésie française propose un modèle de gouvernance innovant et reproductible à l’échelle mondiale.
Défis de la mise en œuvre
La réussite de cette initiative dépendra de la capacité à faire respecter les réglementations, à surveiller les vastes étendues marines concernées et à garantir la participation active des populations locales
Avec la création de la plus grande zone marine protégée au monde, la Polynésie française s’impose comme un acteur clé de la préservation des océans. Cette démarche ambitieuse, alliant science, tradition et engagement communautaire, ouvre la voie à une nouvelle ère de gouvernance des espaces maritimes et constitue un signal fort pour la sauvegarde de la biodiversité planétaire.